Hôtel et Montagne : Gastronomie en haute Altitude
L’Art de recevoir autour des herbes sauvages dans la cuisine du chef étoilé de l’hôtel Alta Peyra
L’hôtel Alpa Peyra se situe dans le village de Saint-Véran au cœur des Hautes-Alpes. C’est un village authentique où vous remontez le temps en permanence en découvrant ses maisons, ses granges, son four à pain. C’est aussi le village le plus haut d’Europe et l’Hôtel est donc tout naturellement l’hôtel le plus haut d’Europe avec une vue imprenable sur les montagnes. Perché à 2040 mètres d’altitude, cet hôtel spa est classé 4 étoiles et dispose de tous les attributs pour être 5 étoiles. Il dispose de trois restaurants et du room service en chambre. Il y a 59 chambres toutes différentes pour vous accueillir.
J’ai rencontré Alexandre Lechêne, chef des trois restaurants que compte cette adresse très accueillante. Il a travaillé dans différents établissements d’Alain Ducasse dont le Louis XV et La Trattoria à Monaco. Arrivé dans cette belle région des Alpes du Sud, il a très vite été à la rencontre des meilleurs producteurs locaux aussi bien basés en France qu’en Italie. Il développe avec talent le restaurant gastronomique de l’ALTA PEYRA, dont il a fait un lieu d’exception. Quand je l’ai rencontré, il ambitionnait d’avoir une étoile Michelin ! C’est bien de rêver, d’être ambitieux et de chercher à innover, s’améliorer et de vouloir proposer le meilleur. Une étoile au Michelin ne s’attrape pas au hasard, il faut travailler et travailler ce qu’a fait Alexandre. C’est également un travail d’équipe, des investissements et il ne faut jamais rien laisser passer. Et un jour, vous vous retrouvez au Guide Michelin qui couronne le travail de toute une équipe autour de son chef. Félicitation Alexandre, notre rencontre m’aura marqué ! Je vous laisse profiter de nos échanges sur sa cuisine et l’art de recevoir et je vous souhaite de gouter sa cuisine !
Comment s’exprime selon vous l’art de recevoir à l’Alta Peyra ? Est-il lié à sa région ?
L’art de recevoir fait parti de la culture française, et je m’efforce à le cultiver au sein de nos trois restaurants. Les clients qui viennent ici ont par ailleurs des attentes particulières qu’ils n’auraient pas forcément ailleurs. Il est important de ne pas les décevoir ! Recevoir, ce n’est pas seulement un accueil chaleureux, c’est pour moi une vraie culture du partage avec le client. Il est nécessaire de lui faire découvrir les produits locaux. Il est donc vrai que l’art de recevoir s’apparente à un partage de la culture locale. Pourtant en arrivant ici, je n’y connaissais rien !
Je suis originaire du centre de la France, j’ai donc grandi sans connaître la montagne. J’ai en revanche toujours aimé la nature, et je savais que j’allais avoir beaucoup de choses à découvrir lorsque j’ai accepté un poste de chef ici, dans les Hautes-Alpes. Au début, j’ai pris mes repères en me basant sur ce que je savais faire dans mes précédents restaurants. Puis rapidement, j’ai eu envie de prendre de nouveaux risques, de découvrir de nouveaux goûts. C’est là que je me suis véritablement intéressé aux produits locaux.
La cuisine montagnarde est connue pour être riche. La tartiflette fait parti des spécialités locales ! Mais les clients attachent beaucoup d’importance à la diététique, donc ce n’est pas vraiment aux recettes montagnardes que je m’intéresse, mais plutôt à la proximité que nous pouvons avoir avec les producteurs des alentours pour obtenir des produits de qualité. Pour l’agneau par exemple, je travaille depuis mon arrivée avec un éleveur de Molines-en-Queyras. Nous avons beaucoup échangé, fait quelques réglages, et j’ai maintenant un produit magnifique. Le contact est primordial: si quelque chose ne me plait pas, je peux en parler directement avec le responsable, et le problème est réglé dès la prochaine livraison.
Cette connaissance de la région acquise au fil des années est selon moi la clé de voûte de l’art de recevoir. Lorsqu’un client arrive dans l’un de nos restaurants qui se situent tout de même à une altitude atypique, il a envie d’être plongé dans notre patrimoine, et de découvrir l’histoire des produits qu’il va manger. Ma nouvelle lubie, que je partage beaucoup avec mes clients, c’est de cuisiner avec les herbes sauvages. Je les étudie, les cultive et les incorpore de plus en plus dans ma cuisine.
Comment en êtes-vous venu à cuisiner des herbes sauvages ? Vous intéressez vous à l’aspect gustatif ou plutôt à l’aspect médicinal ?
En arrivant, je pensais qu’elles n’avaient pas de véritable intérêt. Un peu par hasard, j’ai commencé à m’y intéresser et j’ai rapidement été fasciné par les qualités de ces plantes que nous retrouvons partout autour de nous. J’ai eu la chance d’avoir ici un collègue pâtissier pour jouer le jeu avec moi. Ensemble, nous essayons de connaître au mieux les herbes de notre région. Dans les alentours, nous avons donc commencé à ramasser de la berce, du plantain, de l’hysope, de la bourrache… Désormais, je fais également mes propres cultures.
Ce qui m’intéresse le plus dans la cuisine, ce sont les associations de goûts. Et les plantes sauvages constituent un très bon moyen pour moi de les explorer. Il y a des multitudes de saveurs dans la nature, et le goût des plantes change selon l’utilisation. Je peux les cuisiner séchées, infusées, fraîches, le panel est immense. Pour l’instant, je me concentre donc plus sur l’aspect gustatif, mais l’utilisation médicinale des herbes sauvages est fascinante. C’est la suite logique de ma démarche et je sais que je prendrais le temps de m’y intéresser. En plus, c’est dans l’ère du temps. Cela suscite la curiosité de nos clients et permet d’approfondir la relation de partage que nous recherchons lorsque nous les recevons. Il est important de ne pas faire semblant. Cela se voit beaucoup dans l’utilisation dite médicinale des herbes ou dans des cuisines qui se veulent diététiques sans l’être le moins du monde. Il est important de faire les choses correctement, et de ne pas mentir au client sur les vertus diététiques que nous pouvons proposer.
Nous ne sommes pas non plus un restaurant spécialement axé sur la diététique, et il arrive qu’un client ait envie d’une tartiflette le soir. Dans ce cas-là, il est primordial de lui faire plaisir avant tout. Je peux le conseiller sur des plantes qui vont l’aider à digérer ou dormir. Nous utilisons par exemple régulièrement la camomille, elle facilite la digestion, apaise l’estomac et permet de faciliter le sommeil.
Ce rôle pédagogique prend de plus en plus d’importance chez les gastronomes. Il est désormais essentiel de donner à nos clients le choix de bien manger. Cela demande toutefois de maîtriser de nombreux domaines, la diététique est une vraie exigence. J’ai par exemple ici des fournisseurs qui avaient des produits qui ne me satisfaisaient pas entièrement d’un point de vue diététique. Il m’a fallu faire l’effort de comprendre leur mode et leur vision de production, pour essayer d’améliorer le produit avec eux. Mais cela prend du temps. Manger sainement, c’est une vraie demande du client. Les plantes sauvages y contribuent parfaitement !
Laurent Delporte, éditorialiste et conférencier est un expert stratège du secteur de l’hôtellerie. Visionnaire, il apporte un nouveau regard sur l’hôtellerie au service des décideurs du secteur que cela soit au profit du développement de nouveaux projets ou de l’enrichissement de vision stratégique. Laurent a visité et audité plus de 400 hôtels à travers le monde et participé également à des enquêtes mystères pour contrôler la qualité des plus grands hôtels.